Le 12 juin 2014, celui que le New York Times qualifiait de « chanteur américain le plus injustement ignoré du XXe siècle » s'éteint à Las Vegas, à l'âge de 88 ans.
Troisième enfant d'une fratrie de dix, James Victor Scott est né à Cleveland en 1925. En 1938, sa mère est tuée par un chauffard ivre et son père, alcoolique et coureur de jupons notoire, abandonne sa famille. À 12 ans, il est frappé du syndrome de Kallmann, maladie génétique rare qui altère définitivement sa croissance.
C'est à cette époque que sa voix très particulière se fait remarquer au sein de la chorale d'une église de Cleveland. Parallèlement, il commence à chanter dans les clubs interdits aux mineurs d'où il doit très souvent s'enfuir pour échapper à la police.
À 20 ans, il s’installe à New York. En 1948, il intègre l'orchestre de Lionel Hampton, au côté de Quincy Jones, avec qui il enregistre un disque. Sa voix haute, presque féminine, fait sensation. En 1955, il signe un contrat avec Savoy Records et enregistre deux albums dont un avec Ray Charles. Malheureusement, Herman Lubinsky, à la tête du label, ruine sa carrière en l'empêchant d'enregistrer pour d'autres producteurs. Une autre mésaventure regrettable se produit de nouveau en 1969 avec la parution de l'album The Source : le portrait d'une superbe Afro-américaine sur la pochette suffit à ce qu’on le retire des bacs. Ces événements fâcheux suffisent à mettre un terme à une carrière portant prometteuse.
Retour à Cleveland où il enchaine les petits boulots : aide-soignant, chauffeur de maître, bagagiste. Il disparait du circuit. Le monde oublie sa voix d’ange et son corps de "petit homme" que des producteurs peu scrupuleux n’avaient pas hésité à promouvoir pour des raisons bassement commerciales.
Il fait un retour fracassant sur le devant de la scène en 1991, en interprétant une chanson lors des obsèques de son ami Doc Pomus, chanteur et compositeur de blues. Seymour Stein, le producteur de Madonna, qui assistait à la cérémonie lui propose aussitôt un contrat. Lou Reed, également présent, l'invite à participer à son album Magic and Loss. Le public (re)découvre cette voix extraordinaire sur le titre Power and Glory.
Dès lors, la carrière de James Victor Scott, a.k.a. Jimmy Scott ou Little Jimmy Scott, est défini- tivement lancée et ne s'arrêtera quasiment pas jusqu'à sa disparition.
Paradoxe de cette saga musicale mouvementée : Jimmy Scott a chanté lors de l'investiture de deux présidents américains, à quarante ans d'intervalle : celle de Dwight Eisenhower en 1953 et celle de Bill Clinton en 1993.
>>>>> LITTLE BIG MAN
01 - Every Body Needs Somebody (1955 - Very Truly Yours)
02 - I'm Afraid the Masquerade Is Over (1960 - The Fabulous Songs)
03 - How Deep Is the Ocean (1962 - Falling in Love Is Wonderful)
04 - Unchained Melody (The Righteous Brothers Cover) (1969 - The Source)
05 - At Last (1992 - All the Way)
06 - Power and Glory (in duet with Lou Reed) (1992 - Magic and Loss, Lou Reed)
07 - You Never Miss the Water (Till the Well Runs Dry) (1994 - Dream)
08 - What Are They Doing in Heaven Today ? (1996 - Heaven)
09 - Slave to Love (Bryan Ferry Cover) (1998 - Holding Back the Years)
10 - Blue Skies (2000 - Mood Indigo)
11 - If You Only Knew (2001 - Over the Rainbow)
12 - Bye Bye Blackbird (2002 - But Beautiful)
13 - Yesterday (The Beatles Cover) (2003 - Moon Glow)
14 - Everybody's Somebody's Fool (2004 - Live in Tokyo)
15 - For Once in my Life (in duet with Dee Dee Bridgewater) (2016 - I Go Back Home)
(album posthume enregistré en 2009)
Le chanteur américain le plus injustement ignoré du 20ème siècle. Combien cette épitaphe est vraie. Jimmy Scott avait tout pour être une voix majeure du rhythm'n blues naissant. Le monde du jazz était même trop limité pour son talent. Mais que s'est-il passé pour qu'on l'oublie ?
RépondreSupprimerTrop tendre, trop innocent, trop gentil, le gaillard s'est laissé bouffer par le showbiz
SupprimerJe en connaissais pas son histoire (et en fait pas vraiment l'artiste tout au plus son nom). C'est en tout cas une très belle présentation que tu as fait là. Merci de m'avoir donné envie de le découvrir.
RépondreSupprimerJe ne connaissais pas ce type il y a à peine un mois, je ne suis même pas fan de jazz, mais il mérite vraiment qu'on écoute ses chansons. C'est magique !
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